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Droits LGBT+ : la France en net recul dans le classement Rainbow Europe 2020

ILGA Europe a publié ce jeudi son classement 2020 du « Rainbow Europe » : la France chute de la 9e à la 13e position. En perdant 7 points, elle quitte ainsi le Top 10, avec seulement 56% des 69 critères remplis, comparé à 63% en 2019 et 73% en 2018. Bien loin de sa 5e position en 2017, la France continue sa descente parmi les 49 pays évalués.

Chaque année, à l’occasion du 17 mai IDABLHOTI 1 – Journée internationale de lutte contre les LGBTIphobies, l’organisation ILGA Europe, fédération des associations LGBT+ 2 en Europe et en Asie centrale, publie depuis plus de dix ans son classement annuel « Rainbow Europe”.

https://twitter.com/ILGAEurope/status/1260827439867072513

ILGA Europe évalue la situation des droits des personnes LGBTI 3 dans les 49 pays en Europe, en examinant pas moins de 69 critères, correspondant aux lois et politiques publiques à destination des personnes LGBT+ dans le pays.

Map 2020 (PDF)
Index 2020 (PDF)

Ces critères sont répartis dans 6 grandes catégories : égalité et non-discrimination, famille, crime de haine et discours de haine, reconnaissance juridique du genre et intégrité corporelle, espace de la société civile, asile.

Focus sur le Rainbow Europe 2020

Le Rainbow Europe 2020 se compose d’une carte des pays, d’un Index complet des critères, d’une revue annuelle détaillée de chaque pays, comme les changements apportés à sa législation, les jurisprudences sorties et l’état politique de leur société.

Carte interactive | Classement des pays

La carte interactive offre l’accès aux informations alimentant chaque critère atteint, avec les références, événements, lois, décisions, mesures… une mine d’information.

Top 5 de l’Index 2020

  1. Malta (89%)
  2. Belgique (73%)
  3. Luxembourg (73%)
  4. Danemark (68 %)
  5. Norvège (68%)

Bottom 5 de l’Index 2020

  1. Monaco (11%)
  2. Russie (10%)
  3. Arménie (8%)
  4. Turquie (4 %)
  5. Azerbaïdjan (2%)

La Hongrie enregistre la plus forte baisse dans le Rainbow Index, en perdant plus de 8 points, en raison des procédures suspendues pour la reconnaissance légale du genre et le manque de protection appropriée de l’État lors des événements publics dans le pays.

La France arrive en 2e position du Top des chutes “dramatiques” derrière la Hongrie.

ILGA Europe va jusqu’à citer la France dans son résumé annuel et souligne sa baisse significative :

« Un autre recul important s’est produit, avec la France perdant 6,80% du fait de l’expiration du plan d’action du gouvernement. »

ILGA-EUROPE

En effet, le dernier plan d’action national lancé fin 2016 “Plan de mobilisation contre la haine et les discriminations anti-LGBT” est arrivé à échéance fin 2019, et aucun nouveau plan n’est annoncé pour le renouveler ou le remplacer, malgré les alertes répétées des associations et collectifs mobilisés.

L’inter-LGBT réagit dans son dernier communiqué sur le classement de la France et l’absence de plan d’action :

« Alors que la France a longtemps fait partie du peloton de tête et après des avancées légales majeures (mariage pour tous, inscription de la transphobie dans le code pénal, introduction par la loi Justice XXI du changement d’état civil pour les personnes trans, etc.) ces dernières années ont été marquées par un ralentissement voire un recul de la volonté politique des dirigeant·e·s. […] L’Inter-LGBT rappelle l’urgence de renouveler le plan national de lutte contre la haine et les discriminations anti-LGBT, co-construit avec les associations et ainsi donner une vision politique ambitieuse sur le long terme. »

Retrouvez l’intégralité de leur communiqué sur le site de l’Inter-LGBT

Qu’en est-il en Europe ?

Malheureusement, la France n’est pas la seule dans ce cas là. Des pays autrefois leaders en Europe accusent du retard dans leurs engagements en faveur de l’égalité pour les personnes LGBTI.

Aucun changement positif n’est observé dans près de la moitié des pays.

Pour la 2nd année consécutive, des pays reculent sur le Rainbow Index, pendant que des protections, parfois durement acquises, disparaissent.

« La régression est plus plus visible dans les pays où les droits civils et politiques sont restreints. Les défenseurs des droits humains LGBTI y sont de plus en plus vulnérables, les autorités prennent des mesures actives pour amoindrir les associations de la société civile et essaient d’interdire les événements publics. »

ILGA Europe

A noter aussi :

  • Les droits des personnes Trans sont parmi les plus affectés dans le mouvement actuel concernant l’égalité LGBTI, que ce soit en positif ou négatif.
  • Une autre avancée, même si à une échelle plus réduite, est l’inclusion de mesures égalitaires protégeant les personnes intersexe contre les discriminations. 

Depuis plusieurs années, ILGA-Europe juge la situation très préoccupante et ne cesse de mettre en garde contre les dangers de croire que le travail est fait. Malheureusement, nous constatons année après année des preuves concrètes d’un recul aux niveaux politique et législatif concernant l’égalité LGBTI dans un nombre croissant de pays.

« Il s’agit d’un moment critique pour l’égalité des LGBTI en Europe. Année après année, de plus en plus de pays, y compris des leaders sur les questions LGBTI, continuent de prendre du retard sur leurs engagements en faveur de l’égalité pour les personnes LGBTI, tandis que de plus en plus de gouvernements prennent des mesures actives pour cibler les communautés LGBTI. Il y a des raisons d’être extrêmement inquiet que cette situation se propage alors que toute l’attention politique est focalisée sur les retombées économiques de COVID-19. « 

Evelyne Paradis – Executive Director of ILGA Europe media release May 14 2020.

Si on ne fait rien, ça ne stagne pas, ça recule !

Il est de la responsabilité de chacun et chacune de retrouver une dynamique gouvernementale sur ces questions, pour définir des plans d’action, à court, moyen et long terme et d’agir en faveur de l’égalité des personnes LGBT+.


L’Interassociative lesbienne, gaie, bi et trans (Inter-LGBT), créée en 1999, participe d’un mouvement qui, depuis 30 ans, inscrit sur la place publique la question de l’orientation et de l’identité de genre, et lutte contre les discriminations fondées sur les moeurs, l’orientation ou l’identité de genre, dans le cadre de la promotion des droits humains et des libertés fondamentales.
L’Inter-LGBT regroupe plus d’une soixantaine de structures, dont l’association Mobilisnoo est adhérente.


[1] IDABLHOTI (International Day Against Biphobia,Lesbophobia, Homophobia, Transphobia and Intersexphobia), IDAHOT ou IDAHO selon l’acronyme employé, désignent le 17 mai comme Journée internationale contre les LGBTIphobies. Une date symbolique choisie pour commémorer la décision de l’OMS le 17 mai 1990 de ne plus considérer l’homosexualité comme une maladie mentale. Cette journée a pour but de promouvoir des actions de sensibilisation et de prévention pour lutter contre toutes formes de LGBTIphobies.

[2] LGBT+ : Lesbienne, Gay, Bisexuel·le, Transgenre et (+) autres identités de genre / orientation sexuelle

[3] LGBTI : Lesbienne, Gay, Bisexuel.le, Transgenre, Intersexe